Brève présentation de l’invitée, activité ou profession, lieu de naissance ou pays d’origine, formation ou parcours, lieu de vie.
Fanny Barakat, juriste de formation et responsable du développement durable à Genève Aéroport - établissement public autonome et l'une des plus anciennes plateformes aéroportuaires d'Europe. Son rôle à l’aéroport est de piloter la démarche RSE - aussi bien à travers l’élaboration de la stratégie, la mise en œuvre des plans d’actions relatifs aux enjeux environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG) et la gestion des performances extra-financières de l’aéroport. Engagée dans plusieurs causes qui lui tiennent à cœur - notamment à travers la Fédération romande des consommateurs (FRC) et Toutes à l’école Suisse qui participe à améliorer l’accès à l’éducation et à la santé des filles et des femmes issues de milieux défavorisés de pays émergents - elle demeure convaincue qu’un monde plus durable est encore possible.
Parlez-nous de votre lieu de résidence, ville ou région, activité et si ou ce que vous aimez votre lieu de résidence ?
D’origine auvergnate, je suis arrivée en Suisse il y a plus de dix ans pour finir mes études. J’ai la chance aujourd’hui de vivre dans deux destinations de voyage, deux endroits que j’apprécie et qui se complètent : Genève, que j’aime entre autres pour sa vieille-ville (la plus grande cité historique de Suisse), et le Val d’Hérens en Valais, niché au cœur des Alpes suisses, à 1’300m d’altitude, pour sa beauté sauvage et son authenticité préservée.
Vos adresses incontournables près de chez vous ? (restaurant, marché, galerie, musée, à ne pas manquer, adresse intime ou secrète, etc.)
Le marché foisonnant de Carouge les samedis matin du printemps à l’automne - souvent musicalement animé pour flâner et prendre un café et en terrasse.
Le musée le plus captivant de Genève, le MEG, qui nous propose une véritable plongée dans l’origine des civilisations et des expositions temporaires superbes – un véritable concentré d’excellence et de diffusion de la culture !
La sublime et mythique salle du Victoria Hall pour un concert - l’une des salles de concerts classiques les plus réputées en Europe.
Et pour les papilles, un déjeuner au bord du Rhône à NAMA, déguster les délicieuses crêpes au Sarrasin au Blé Noir à Carouge et un diner au Rajpoute, le meilleur restaurant indien de Suisse ! Enfin, le Chat-Botté pour les grandes occasions.
Vos adresses préférées sur Terre ?
Les volcans d’Auvergne m’ont vu grandir. J’aime retourner sur les terres volcaniques, me retrouver à Gergovie ou au château de Murol, me baigner dans les sources thermales de Royat, parcourir la route des formages AOP d’Auvergne (découvrir les saveurs du cantal, du Saint Nectaire, du bleu ou encore de la fourme… j’en ai l’eau à la bouche), grimper le Puy-de-Dôme pour admirer le panorama, et le volcan de Lemptegy situé sur la faille de Limagne inscrite à l’Unesco - un retour aux sources essentiel.
Pensez-vous qu'il soit important de voyager et pourquoi ?
Le voyage est un moment hors du temps, qui induit une capacité à improviser, à ne pas dépendre d'un plan. Il me semble que le voyage, c'est aussi l'imprévu. Partir à l’aventure. Les voyages nous poussent à sortir de notre zone de confort, à nous adapter à un nouvel environnement, parfois à une culture très différente de celle que nous connaissons. Souvent, ils ont un effet de transformation de notre manière de vivre, de penser, de fonctionner, et, comme le disait le célèbre écrivain voyageur suisse Nicolas Bouvier, « On croit qu’on fait un voyage, mais bientôt c’est le voyage qui vous fait, ou vous défait ».
J'ai grandi avec un récit familial du voyage. Du côté de mon père, mon grand-oncle était prêtre et avait beaucoup voyagé entre les deux guerres - à une époque où prendre l’avion n’était donc pas si commun. Et j'ai été entourée dans ma jeunesse, de trésors, des tableaux, des lettres qui venaient d’Asie, d’Afrique ou encore d’Amérique centrale.
Mais le voyage n’est pas uniquement physique, il est aussi intérieur. Et la lecture peut nous emmener très loin comme le disait si bien Victor Hugo « Lire, c’est voyager : voyager, c’est lire ». Beaucoup de récits de voyage et de mythes m’ont forgé dont trois en particulier : l’Odyssée d’Homère, L’usage du monde de Nicolas Bouvier, et Out of Africa de Karen Blixen. Lorsqu’on voyage – que ce soit physiquement ou dans les livres – il me semble que nos préjugés, intolérances et étroitesses d’esprit s’effondrent, notre vision et champ de compréhension s’élargissent.
Que pensez-vous de l’avenir du voyage et ce que nous devons (citoyens) considérer ?
On s’interroge aujourd'hui sur les destinations touristiques prisées - notamment lié à l'empreinte carbone de l’avion et à l’impact sur les milieux naturels et la biodiversité. Ma définition du voyage a énormément évolué ces dernières années. Elle n’est plus liée au fait de prendre nécessairement l'avion et de me rendre dans des destinations prisées. Pour autant, je me considère comme une voyageuse. Donc, c'est une vraie réflexion qu'on peut avoir vis-à-vis du voyage. Néanmoins, il me semble primordial de sortir de l’idée reçue selon laquelle un mode de vie responsable signifie privations et contraintes mais peut être désirable et heureux. Aujourd'hui, j’aime les micro-voyages, ces parenthèses, ces pauses de deux-trois jours sans partir à des milliers de kilomètres de chez soi. Selon moi, le voyage va nécessairement se transformer. Pour atteindre l’objectif de l’Accord de Paris, il me semble que nous allons devoir apprendre à voyager autrement, voyager en prenant son temps. Prendre conscience également que cela reste un privilège et va le devenir de plus en plus à l’avenir – d’où l’importance de proposer une autre manière de voyager, d’expérimenter le slow travel, de prendre son temps, de profiter du voyage, de chaque paysage jusqu’à la destination. « L’importance, ce n’est pas la destination, c’est le voyage » comme le rappelle la célèbre formule de Robert Louis Stevenson.
Que conseillerez-vous ?
Se réapproprier l’idée du voyage, explorer, ralentir, partir à l’aventure, la vraie, celle qui nous ouvre à l’extraordinaire – et cela peut être à côté de chez soi.
En tant que femme, comment jugez-vous l’avenir de notre terre ou de nos sociétés ?
Nous sommes toutes et tous dans le même bateau, nous vivons sur la même planète et il me semble que la solution à un avenir plus pérenne se fera ensemble. Nous sommes à un moment charnière pour l’avenir de l’humanité, des écosystèmes et du vivant, toutefois il ne faut pas se décourager et se résigner au pire des scenarii. Que ce soit dans les discours publics et politiques ou du côté du grand public, la prise de conscience est globale. Presque plus personne ne considère le changement climatique comme un non-sujet. Ce qu’il faut maintenant c’est passer à l’action, à la bonne échelle et accélérer. Et il me semble que les femmes ont un rôle moteur et/ou précurseur à jouer dans la préservation de l’environnement et des ressources naturelles mais également en tant qu’impact positif majeur sur la société. Je le constate au sein de l’association Toutes à l’école qui participe à améliorer l’accès à l’éducation et à la santé des filles et des femmes issues de milieux défavorisés de pays émergents. L’éducation est le pilier du changement. Plus les femmes seront instruites, plus nous serons capables d’agir et de transformer le monde. Investir dans leur instruction, c’est non seulement défendre leurs droits actuels, mais aussi garantir un avenir plus juste et prospère, où elles participeront à parts égales aux grandes solutions mondiales : du changement climatique à la croissance économique, en passant par la résolution des conflits.
Comment pensez-vous y contribuer ? Des femmes qui vous marquent ?
À défaut d’être devenue aventurière comme je le souhaitais enfant, je me suis retrouvée sur les bancs de l’Université en droit. Mon master en poche, je me consacre désormais d'aider à créer un avenir où l'industrie aéronautique se développe dans des proportions compatibles avec un monde vivable en 2050. Depuis le début de ma carrière dans les secteurs privé et public, je m'engage à défendre et à faire progresser les performances environnementales, sociales et de gouvernance des entreprises. La règlementation bouge en la matière. Néanmoins, je ne pense pas que cette dernière puisse régler à elle seule tous les problèmes. Les innovations et la sobriété permettront également à l’ensemble de la société d’arriver à des résultats concrets.
Par ailleurs, mes diverses participations dans les comités de direction et activités caritatives se concentrent sur l'impact durable - notamment à travers Toutes à l’école Suisse et la Fédération romande des consommateurs.
J'ai une grande admiration pour ces femmes pionnières qui ont ou marquent l’histoire – comme Alexandra David-Neel - une femme hors du commun, orientaliste, cantatrice, féministe, écrivaine, exploratrice… devient la première voyageuse occidentale à entrer dans Lhassa au Tibet alors interdite aux étrangers ; Olympe de Gouges, Louise Michel, Virginia Wolf, Simone Veil ou encore Jane Goodall.
Ces femmes m’inspirent, me poussent à l’effort, à me dépasser et à oser.
Quel serait votre rêve de voyage ?
Partir à la découverte des Îles Ioniennes en Grèce sur les traces d'Ulysse en revivant l'aventure antique : le livre dans les mains, l’aventure sous les pieds, à la recherche des « portes de la mer ».